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Nationalisme

Au sein d'un Etat-nation existant, le nationalisme donne la primauté à la nation par rapport  à toute autre considération dans les relations internationales.

Ce nationalisme peut trouver son origine dans des peurs provoquées par des dangers extérieurs ou par un ennemi intérieur (xénophobie, antisémitisme). Il conduit alors à un certain isolement et au retour vers le système de valeurs sur lequel est fondée la nation. Le nationalisme est une des caractéristiques de l'extrême droite. Dans la première moitié du XXe siècle, le nationalisme a été à l'origine du fascisme italien et du national-socialisme allemand (nazisme).

Le nationalisme, concept né à la fin du 18e siècle, notamment pour répondre aux nouvelles exigences de la société industrielle, peut recouvrir deux réalités. D'une part, il s'agit d'une doctrine politique qui revendique pour une communauté la constitution d'un État-Nation doté d'un territoire, d'une constitution, d'une législation, etc. ou, si celui-ci existe déjà, son développement. Pour arriver à ses fins, cette doctrine s'appuie sur l'autre versant du nationalisme, c'est-à-dire le sentiment d'appartenance à une nation reconnue comme un groupe partageant une culture, des traditions, une langue, une histoire, une religion... communes. Si au 19e siècle, il semblait légitime pour des peuples de se constituer en état indépendant et souverain sur son territoire selon la logique du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, le 20e siècle a en revanche connu l'échec des nationalismes, berceau des fascismes, par l'expérience des deux guerres mondiales. L'apogée du nationalisme dans son caractère raciste et donc de rejet voire de destruction d'autres peuples a connu son apogée avec le national-socialisme ou nazisme de 1933 à 1945.

Le nationalisme est aujourd'hui perçu péjorativement parce qu'il constitue, pour des groupuscules ou partis d'extrême droite, un levier pour soutenir la xénophobie, pour nourrir l'hostilité à toute mixité culturelle et pour prôner la « préférence nationale », l'arrêt de l'immigration, voire le renvoi des étrangers. Par « préférence nationale », expression forgée par des proches du Front National français, il faut entendre la volonté de réserver aux détenteurs de la nationalité, ici française, des avantages (souvent financiers) et la priorité à l'emploi. De même, il s'agit suivant ce principe de refuser des aides sociales à ceux qui ne disposent pas de cette même nationalité.

Il convient par ailleurs de distinguer nationalisme et patriotisme. Le patriotisme est communément défini comme un amour de la patrie, amour qui peut se muer en dévouement voire en sacrifice pour défendre cette même patrie. Le patriotisme peut créer du lien et rapprocher les différents groupes sociaux. Il exalte également le génie national. Poussé à son extrême, il a tendance à stigmatiser l'autre, l'étranger. Mais, là où le patriotisme s'accommode de conceptions politiques diverses, le nationalisme est davantage une idéologie politique qui tend à s'institutionnaliser dans des partis spécifiques. Et selon la formule de Romain Gary : « Le patriotisme, c'est l'amour des siens. Le nationalisme, c'est la haine des autres. » (Éducation européenne, 1945)

L'idée de nation
Pour comprendre ce que peut recouvrir le nationalisme, il nous faut cerner l'idée de nation. Celle-ci désigne un groupe humain, une communauté constituée sur la base de sa conscience de constituer une unité et sur sa volonté de vivre en commun (suivant les critères linguistiques, culturels, etc.). Mais un peu à la manière d'une famille, on ne choisit pas ses concitoyens et a fortiori, on ne les connaît. La nation est donc une communauté imaginaire. Elle est en outre une masse changeante qui mue incessamment au gré de l'histoire. Les nationalistes ont ce défaut de croire que la nation est une entité figée, constituée une fois pour toutes. Au centre de la doctrine nationaliste émerge l'idée que les nations et l'appartenance à la nation constituent des réalités naturelles et innées. C'est là nier les changements inhérents à l'histoire. C'est refuser le caractère évolutionniste de toute société et de là stigmatiser voire criminaliser tout élément (humain ou non) constitutif de cette évolution. Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu'une nation reçoit souvent ses attributs du pouvoir qui la gouverne et qui met en place des leviers tels que l'information, l'art, l'enseignement pour induire chez ses membres cette conscience commune. Elle mobilise également des « symboles nationaux », des faits historiques sortis de leur contexte et qui exaltent les héros passés. En cela la nation est un concept politique et non ethnique, religieux, ou même géographique, etc. En d'autres termes, « tout nationalisme est d'abord un phénomène de société se fondant sur une construction de la réalité », de même que « la nation est une construction édifiée à un moment précis dans des circonstances extrêmement concrètes ». (Sophie de Schaepdrijver, Nation et nationalisme, 2006)
On trouve une illustration parfaite de ce processus dans le discours de Massimo d'Azeglio lors de la première assemblée du parlement italien : « Nous avons créé l'Italie, il nous reste à créer les Italiens. » Ce principe a été appliqué dans quantité de nouveaux États indépendants au 19e siècle alors qu'ils englobaient plusieurs nations. Si l'État-Nation a eu son heure de gloire, il est incontestable qu'il ne correspond plus à la réalité actuelle et qu'il est vain d'espérer (cela est-il souhaitable d'ailleurs) que correspondent frontières politiques et culturelles. Cet espoir insensé, irréaliste et du reste désolant est au cœur du discours nationaliste d'extrême-droite qui soutient qu'un État ne peut être constitué que par une seule nation. Toutefois, on trouve dans les rangs de l'extrême droite deux conceptions de la nation qui définissent d'ailleurs deux écoles nationalistes, la seconde étant plus virulante : d'une part une conception assimilationniste de la nation qui serait une communauté fondée sur l'adhésion volontaire à des valeurs communes ; d'autre part une tendance plus ethniciste qui définit le membre de la nation comme l'héritier de l'histoire de son pays, de sa langue, de sa culture, de ses coutumes dans ce qu'elles ont toutes de plus traditionnel. Cette seconde tendance croit en outre en l'inégalité des races. On retrouve ces deux conceptions dans le principe de « préférence nationale », pilier de l'idéologie d'extrême droite.

Stratégie de l'extrême droite dans son utilisation du concept de nationalisme
L'extrême droite n'a de cesse d'activer le levier du nationalisme par une habile stratégie de communication destinée à rallier tout un peuple, exploitant et à l'occasion gommant les pourtant criantes différences socio-économiques afin de ne léser personne et de ratisser large dans les rangs de l'électorat. Ainsi, faisant mine de mettre tous les citoyens sur un pied d'égalité, elle s'attache à exalter un sentiment de supériorité nationale à tous les échelons de la société. Ce qui compte n'est alors plus la hiérarchie au sein de la nation mais le développement de la supériorité nationale par rapport aux « autres », aux étrangers, à ceux qui sont dénoncés comme des « envahisseurs ». De cette manière, le citoyen qui est tout en bas de l'échelle sociale est érigé à une place qui reste plus haute que celle de n'importe quel étranger même issu de classe sociale plus élevée. Cette stratégie consiste en d'autres termes à désigner un ennemi commun en formant un camp national fort et soudé autour d'une culture illusoirement commune et dotée d'une soi-disant mission d'auto-protection. En cela, l'extrême droite séduit notamment les plus défavorisés qui se sentent appartenir à une communauté forte et supérieure, sorte de club fermé national tandis qu'elle flatte les plus riches qui voient à travers ce système une possibilité supplémentaire d'enrichissement.